Périco Légasse assaisonne Hervé This : un pur régal !
A la page 247 de son ouvrage, il use de son franc-parler dans l'article consacré à Hervé This flanqué du titre de "Docteur Folamour du topinambour déstructuré". Hervé This, on le sait, continue de diffuser sa "pensée", entre organes de presse et colloques ou conseils et livres consacrés à la gastronomie.
Lisons-donc Périco Légasse :
Adulé par certains grands chefs en quête du surpassement de soi dans l'exaltation intersidérale des sens, comme Pierre Gagnaire, avec lequel il poursuit sa croisade anti-matière, encensé par les tenants de la révolution gustative, admiré par les adeptes du salami pulvérisé et de la paupiette lyophilisée, loué par les détracteurs de la cuisine française, Hervé This est l'idéologue du "constructivisme culinaire", doctrine établissant que toute préparation est considérée comme bonne pourvu qu'elle suscite une émotion.
Influent auprès des pédagos de l'Education nationale, il est, peut-être à son insu, le meilleur allié de la malbouffe industrielle puisqu'il légitime la délégitimation des saveurs originelles et quelque part, en tant que prescripteur d'une alimentation artificielle, le fossoyeur de la gastronomie. Le genre d'individu pour lequel on donnerait sa vie afin qu'il puisse continuer à nous gonfler."
Avec Périco Légasse, on voit bien que la déconstruction culinaire du produit est une nouvelle croyance érigée en dome moderne. Tout cela va bien avec l’enseignement dans les écoles de cuisine qui prône le prêt à manger, les poissons en filet, les viandes dégraissées, le sous-vide et le surgelé au profit du produit frais et vivant, de sa connaissance dans son intégrité originelle.Ceux-là veulent ajouter à la musique binaire – un boum boum bruyant et sans harmonie – dont on nous gratifie dans les tables à la mode, une sorte de charivari des saveurs. C’est oublier, selon le mot de François Rabelais que « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».
Ignorer le lien entre l’assiette et notre environnement, le paysage rural, les traditions, la biodiversité et l’éducation au goût, c’est sacrifier la gastronomie sur l’autel de la grande industrie alimentaire. Ne faut-il pas plutôt créer un véritable lien entre les communautés nourricières, les producteurs, et les chefs, avec ceux qui cultivent, qui élèvent, puis, ensuite les distribuer d'une manière permettant de respecter l’environnement, de protéger la santé des consommateurs tout en sauvegardant la dignité des hommes en les rémunérant justement.
Le sacro-saint produit – souvent vanté ici ou là dans les bistrots et restaurants par des chefs qui le respecte – de ces hommes qui en sont les artisans, est un contrepoint juste à l’agriculture et l’alimentation industrielles, jouant un rôle de passeur et de sentinelles, loin des débordements de la paille et du moléculaire.
Bon appétit quand même et... large soif ! Parce que l'irrévérence est toujours salutaire et qu'il faut savoir dire non.
- "Dictionnaire impertinent de la gastronomie", Périco Légasse, "FB François Bourin Editeur", 2012.